Andouillette : L’andouillette est un produit de charcuterie française dont la définition fut longtemps fluctuante. De forme cylindrique, de longueur variable, elle est très majoritairement élaborée, de nos jours, à partir d’éléments du tube digestif du porc (chaudins ou frison) coupés en lanières et précuites dans un bouillon ou dans du lait.
Elle peut aussi être constituée, en tout ou partie, d’éléments du veau, dont l’intestin grêle — l’utilisation de la fraise de veau, proscrite pendant une quinzaine d’années, étant autorisée depuis 2015.
L’andouillette, qui est commercialisée cuite sauf à de rarissimes exceptions obligatoirement mentionnées, doit sa saveur à la matière première, scrupuleusement nettoyée, mais aussi aux aromates, épices, condiments, vins ou alcools dosés selon les recettes. Son goût et son odeur, parfois très prononcés, peuvent surprendre. Sa fabrication et sa commercialisation hors de France restent marginales.
Les andouillettes ne sont jamais fumées, contrairement à l’andouille.
L’andouillette est généralement cuite, sauf à de très rares exceptions, obligatoirement mentionnées.
Cette préparation est ensuite aromatisée (différemment selon les régions de fabrication) avec de l’oignon ou de l’échalote et du vin blanc et enserrée (embossée) dans une partie du gros intestin. Elle se vend en portion de 10 à 15 centimètres de long, parfois enrobée de saindoux, de chapelure ou de gelée.
Il existe plusieurs dénominations et appellations d’origine liées au lieu de fabrication et aux ingrédients entrant dans sa composition. L’andouillette ne bénéficie ni d’Indication géographique protégée (IGP), ni d’AOC, mais a droit depuis 2016 à un Label Rouge, assez contraignant dans son règlement.
Parmi les andouillettes les plus réputées : l’andouillette de Troyes (Est de la France), celle d’Arras qui est faite avec le frison de porc, celle de Rouen, celle d’Alençon, celle de Cambrai et celle de Clamecy et celle de Saint-Pourçain (Voir le Tableau des Caractéristiques des différentes andouillettes françaises ci-après).
Caractéristiques des différentes andouillettes françaises
Nom | Région | Description | Flaveurs |
---|---|---|---|
Andouillette d’Alençon | Basse Normandie | Andouillette faite avec du frison de porc, précuite emballée en boyau de bœuf, cuite en bouillon aromatisé | très peu marquée |
Andouillette bourguignonne | Bourgogne | Andouillette avec chaudins de porc précuits avec de l’échalote, de l’ail et de la moutarde | spécifique des aromates |
Andouillette de Cambrai | Cambrésis | Andouillette faite avec de la fraise de veau,précuite emballée en boyau de porc ou de bœuf, cuite en bouillon aromatisé (persil, échalote ou oignon), portionnée (coupe ou clipage) | spécifique des aromates |
Andouillette de Clamecy | Bourgogne | Andouillette avec chaudins de porc précuits et de la panse de veau coupés en lamelles, à l’échalote, à l’ail et vin blanc | spécifique des aromates |
Andouillette de Jargeau | Loiret | Andouillette avec chaudins de porc précuits et maigre de porc (20-30 %) | entre andouillette et saucisse |
Andouillette lyonnaise | Rhône | Andouillette avec fraise de veau et parfois un peu d’estomac de porc et de veau | plutôt douce |
Andouillette du Périgord | Périgord | Andouillette faite avec chaudins et estomacs de porc, parfois gorge non découennée (10-15 %) | légèrement croquante |
Andouillette provençale | Provence | Andouillette faite avec chaudins, estomacs et menus de porc blanchis, gorge non découennée, (15 % max) de porc découpée en lanière, portionnée et panée | de l'assaisonnement (ail, persil, etc) |
Andouillette à la rouennaise | Basse Normandie | Andouillette faite avec une moitié de boyaux de porc (sans estomac) et une moitié de veau fraise de veau | légèrement marquée |
Andouillette de Saint-Pourcin | Auvergne | Andouillette avec chaudins de porc dégraissé à la main, puis échaudé et taillé en lanières, assaisonnés à la muscade et moutarde | spécifique des aromates |
Andouillette de Troyes | Toute la France | Andouillette pur porc : chaudins et estomacs, découpés en lanières et assemblés en portions de pur porc, dressés à la main ou embossés. Dimensions : cylindre de 12-15 cm de long et 9-4 cm de diamètre | bien marquée |
L’andouillette dans la gastronomie : En France métropolitaine, et notamment à Paris, un grand nombre de brasseries, d’établissements de chaînes et de bistrots servent communément de l’andouillette, souvent en mentionnant le « label » AAAAA sur leur carte… sans pour cela s’obliger à citer le nom de l’élaborateur.
Très peu de restaurants valorisent l’andouillette avec des préparations originales. Les accompagnements sont médiocrement diversifiés : les pommes frites, avant tout, purée et haricots verts aussi proposées assez souvent. Plusieurs chefs, à l’exemple lointain de Charles Barrier, cuisinier tourangeau des années 1950-60 ayant obtenu trois étoiles au guide Michelin, ont cependant imaginé des recettes variées. Notamment à Troyes (Le Jardin Gourmand, Le Bistroquet, Les Crieurs de vin).
Marc Haeberlin, le grand chef alsacien « trois macarons » au Michelin, avait établi une recette d’andouillette à la bière, testée avec une andouillette de Troyes AAAAA provenant de chez Lemelle (l’Alsace ne fabrique pas d’andouillettes).
Les préparations simples au vin, par exemple de chablis, vouvray (relativement sec), sont nombreuses. Pour des raisons de prix de revient, et parce qu’une bonne qualité suffit gustativement, elles ne sont en principe pas réalisées avec un coûteux grand ou premier cru.
Les andouillettes naguère produites à Drancy par Simon Duval furent longtemps servies avec de l’aligot au restaurant parisien « L’Ambassade d’Auvergne », au siècle dernier. Le restaurant « Le Passage », sous l’égide de Soizic de Lorgeril, au milieu des années 1990, donna, passage de la Bonne-Graine, à Paris, un exemple vraisemblablement resté inimité : la carte proposait huit sortes d’andouillettes (notamment celles de Lemelle, Hardouin, et Simon Duval, ce dernier alors en exercice), poêlées, avec gratin dauphinois, purée de pois cassés ou lentilles, ainsi qu’une fricassée d’andouillettes « à l’ancienne », à la crème fraîche et au vouvray. Cela avait été salué par le jury de l’ AAAAA.
Les andouillettes de Troyes de l’Aubois Christophe Thierry sont proposées dans plusieurs restaurants bars à vins de Paris et à Troyes, celles de la maison Hardouin, souvent dites « de Vouvray », figurent sur plusieurs cartes du Val de Loire et de la région parisienne.
Pierre-Brice Lebrun, dans son ouvrage L’Andouillette de Troyes, édité en 2008, donnait les adresses de restaurants servant des andouillettes élaborées par des lauréats AAAAA à l’époque de la publication (diplômes valables deux ans). Ce petit livre, très documenté et nourri d’anecdotes plus vérifiées qu’à l’accoutumée, est toujours de consultation utile, et seul de son genre.
Une originalité : le cuisinier-restaurateur élaborateur : Jusqu’en 2016, un restaurant français confectionnait entièrement ses andouillettes, dans un secteur dédié de sa cuisine, à partir des produits de triperie frais, plutôt que de les acheter prêtes à être réchauffées et accommodées, selon l’usage courant : le « Bistroquet » de Troyes. L’équipe de cet établissement du centre historique, qui a fermé, mettait le produit en vedette sur sa carte, en gratin au chaource, en cocotte à la moutarde, aux morilles, à la plancha, et la débitait même « au mètre ».
Cet établissement n’avait pas d’émules en France : il faut dédier de l’espace à l’élaboration du produit, qui nécessite une main-d’œuvre adéquate, et respecter des règles d’hygiène strictes. Au Japon, le restaurant de Kyoto dénommé « Bistrot Bons Morceaux » sert une andouillette de qualité totalement élaborée « sur place » par le chef propriétaire, Masaki Kubo.
Qualités gustatives et olfactives :L’andouillette a un goût très puissant, qualifié de musqué par le Guide Michelin, un peu moins marquée lorsqu’elle est fabriquée à base de fraise de veau. Son odeur aussi est très prononcée, et a la réputation de n’être pas aimée des enfants, voire des femmes et des étrangers, de telle sorte que des recettes sont parfois proposées pour en masquer le goût. Elle peut être très appréciée ou détestée.
Quelques préparations culinaires d’andouillettes :
Accord du sommelier : L’andouillette est de bon accord avec de nombreux vins rouges peu tanniques et désaltérants, comme le beaujolais et divers autres vins issus du pinot noir mais aussi avec des blancs secs ou secs tendres.
Le champagne brut, souvent recommandé en Champagne auboise, les crémants secs, le cidre et le poiré s’entendent bien avec l’andouillette.
Jean-Pierre Coffe, vantant autrefois des andouillettes préparées au jasnières, conseillait de déboucher ce vin blanc à table, mais proposait aussi des montlouis-sur-loire et vouvrays secs ou secs tendre. Dans le cas d’une andouillette à la moutarde, il orientait plutôt vers les rouges issus du gamay, beaujolais ou touraine.
Gilbert Lemelle, charcutier aubois artisan, puis industriel, aux affinités de terroir, privilégiait le vin de Champagne de son département et ne s’éloignait pas en proposant un irancy.
En bon Chablisien, spécialiste de l’andouillette de Chablis (et au chablis), Marc Colin vida bien des bouteilles des vignes qu’il connaît si bien lors d’une balade d’amateurs d’andouillettes dont faisait partie le grand cuisinier Marc Meneau, chez qui il avait été apprenti en sa jeunesse.
Son fils et successeur Dominique apprécie les bulles de Drappier et de Veuve Devaux (champagnes de l’Aube), préconise aussi des chablis : l’Yonne est proche. Il suggère éventuellement un fleurie, un saint-amour, un touraine gamay de Marionnet, rappelle que le cidre du pays d’Othe, parfois utilisé en appoint lors de la préparation d’un plat d’andouillettes, fait une boisson d’accompagnement très à propos dans le sud de l’Aube et la partie limitrophe de l’Yonne.
À Sainte-Savine, gros bourg limitrophe de Troyes, le charcutier Christophe Thierry propose quelques vins dans sa boutique. S’il n’oublie pas le champagne, en bon Aubois, il a un faible pour les rouges peu tanniques, tels les crus du Beaujolais, et aime les anjous souples.
Christophe Thierry, autre aubois charcutier, prône aussi le champagne, vante l’accord sans brutalité avec un bon beaujolais, propose des anjous dans son magasin de Sainte-Savine.
Pour Marc Colin, qui s’est imposé dans l’Yonne avec son andouillette de Chablis, le choix d’un chablis s’impose évidemment, premier cru si possible.
L’ouvrage Le Vin à table, « encyclopédie » des harmonies mets-vins parue fin 2006, par la suite remaniée, accorde une place importante à l’andouillette, valorisée dans l’édition 2013 (éditions Artemis). Proposant de nombreux accords, nuancés selon la préparation, il conseille notamment le pouilly-fuissé, le saint-véran, le mâcon, le chablis, le sancerre, le pinot d’Alsace et le savennières parmi les blancs, le marsannay et le tavel en rosé, divers beaujolais, le côtes-de-toul, le coteaux-du-giennois, le « touraine-gamay » et l’anjou villages en rouges. Là aussi, évocation favorable du champagne et des bons crémants, qui apportent de la fraîcheur et décapent agréablement le palais.
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