À la table des jurés du Prix Goncourt (*), la plus prestigieuse des distinctions littéraires.
La gastronomie et les arts de la table sont indissociables du Prix Goncourt. Depuis le 31 octobre 1914, le restaurant Drouant, situé place Gaillon dans le 2ème arrondissement à Paris, accueille les jurés de l’Académie Goncourt au 1er étage, dans le salon Goncourt, avec vue sur la paisible place Gaillon près de l’opéra Garnier. Les « dix » s’y retrouvent à l’heure du déjeuner chaque premier mardi du mois (sauf en été). Sur une idée d’André Billy en 1951, ils disposent d’un couvert en vermeil, gravé aux noms, écrits en italique de chaque titulaire et des ses prédécesseurs. Ils sont précieusement gardés dans un coffre en chêne foncé. Les jurés sont très attachés aux traditions.
Si jamais leurs couverts ne sont pas mis sur la table ovale qui leur sert de bureau pour les séances de travail, Didier Decoin (président de l’Académie Goncourt depuis janvier 2020), rappelle à l’ordre le maître d’hôtel. En 2023, aux fourneaux, Romain Van Thienen, le chef exécutif est le maestro.
Le secrétaire général de l’Académie Goncourt est chargé de préparer le menu pour la séance de remise du prix en collaboration étroite avec lui. Ce menu comporte généralement un foie gras, un peu de caviar, des crustacés (don un petit homard), une pièce de gibier (à poils ou à plumes), un poisson noble, du fromage et souvent une omelette norvégienne en dessert. La cave est excellente. Nul plat rituel ou fétiche. Ce qui n’interdit pas aux jurés d’exprimer une préférence. Ainsi, le juré André Stil avait une passion pour le turbot. Ses neuf commensaux en ont largement profité. Didier Decoin s’est aventuré une fois à inscrire une bouillabaisse au menu. Les réactions du jury furent tièdes : compliquée à manger, moins bonne qu’à Marseille. Quand un nouveau juré s’assied à la table ovale, on met les petits plats dans les grands. Le présentateur d’émission littéraire Bernard Pivot dégusta l’un des « mots de sa vie », une poularde de Bresse demi-deuil (contisée aux lames de truffe) et servie dans une sauce mousseline. les frères fondateurs Goncourt, deux lauréats et une ancienne présidente du prix ont leur nom à la carte du restaurant : tout client peut aujourd’hui savourer une salade Colette, une tarte fine Romain Gary au caviar, un vol-au-vent façon frères Goncourt, et, pour les gourmands, une madeleine de Proust « mémorable » (…) et géante accompagnée de chocolat fondu et de crème fouettée.
Site interne officiel du restaurant Drouant
E-mail : restaurant@drouant.com
Menus et carte du restaurant Drouant
Position du restaurant Drouant sur Google Map
(*) Le prix Goncourt est un prix littéraire français récompensant des auteurs d’expression française pour un ouvrage en prose publié par un éditeur francophone et être distribué en librairie (le livre doit être, disponible dans les rayons la première semaine de septembre). Tous les romans paraissant à la rentrée littéraire peuvent candidater. L’éditeur doit envoyer un exemplaire du livre à chaque membre de l’Académie au plus tard le 7 septembre.
Le prix Goncourt a été créé par testament en 1892 par Edmond de Goncourt (1822-1896). La Société littéraire des Goncourt, dite Académie Goncourt, est officiellement fondée en 1902 et le premier prix Goncourt proclamé le 21 décembre 1903. Ce prix a donc eu 120 ans en décembre 2023.
Au menu du prix Goncourt servi le 7 novembre 2023
- HUÎTRE CHARLES DROUANT AU CAVIAR
- Maison Madec, Prat-Ar-Coum, huîtres n°2 et Schrenki x Dauricus, jus de moules, confit de citron. L’huître au caviar est servie en souvenir de Charles Drouant qui a été l’un des premiers restaurateurs parisiens à proposer des huîtres en provenance de Bretagne.
- TURBOT COCTEAU
- Un turbot au jardin marin, œufs de truite, coques, feuilles de câprier, huile herbacée. Présenté dans une nage ponctuée de fruits de mer, il évoque le fameux “ ciel de la mer ” ; comme le poète, peintre, dessinateur, dramaturge et cinéaste français Jean Cocteau (1889-1963) aimait à désigner le plafond du restaurant Drouant.
- CHEVREUIL HUYSMANS
- Figues noires, sauce grand veneur, cerises noires, encre de seiche. Le chevreuil est le gibier à poils cuisiné cette année. Il est servi dans une assiette où accompagnements et sauce sont noirs, en clin d’œil au repas tout noir évoqué par l’écrivain et critique d’art français Joris-Karl Huysmans (1848-1907) dans son roman “ À rebours ” paru en 1884.
- FROMAGES CLOS DE MONTMARTRE
- Des fromages de “Chez Virginie” fromagère affineuse. Ce quartier parisien de Montmartre est un haut lieu de la création artistique et intellectuelle de la rive droite et plus précisément dans le 18ème arrondissement de Paris.
- MIRABELLES CLAVEL
- Sorbet mirabelle absinthe, chantilly vin jaune et mirabelles.
Un hommage à l’écrivain français originaire de Franche-Comté Bernard Clavel (1923-2010), apprenti pâtissier avant de devenir écrivain. Dans son livre “ Les fruits de l’Hiver ” (prix Goncourt 1968), le héros chérit un prunier trônant dans son jardin. Les mirabelles sont conservées au sirop en bocal, pour être appréciées tout au long de l’hiver.
- Sorbet mirabelle absinthe, chantilly vin jaune et mirabelles.
